II y a alors toutes les chances pour que l'enfant, une fois passé le moment de la frustration, comprenne que l'interdit n'est pas un acte arbitraire mais bien un outil qui peut l'aider à se développer. 

"À condition bien sûr, que l'ordre ou l'interdit ait été prononcé sereinement. Ce qui ne va pas toujours de soi : cris et coups partent parfois plus vite qu'on le voudrait, nous disqualifiant sur le champ aux yeux de l'enfant. "

"Quand Luc commençait à déraper, je savais qu'il fallait que j'intervienne, remarque Myriam, sa maman, mais souvent j'attendais trop longtemps et je me laissais déborder par ma colère. Résultat, je regrettais la manière dont je m'y étais prise, je culpabilisais et en plus, Luc n'avait rien appris." 

Ce constat lucide, nous sommes nombreux à le faire mais plus rares à pouvoir développer des pratiques constructives. "Depuis que je me suis ouverte de mes soucis à un groupe d'échange, j'ai appris à accepter ces émotions négatives et à les analyser. Or, le plus souvent, ma colère est à imputer à ma propre histoire, pas à mon enfant." 

Cette étape décisive conduit à différer le passage à l'acte quand, poussé à bout, on sent sourdre en soi une irrépressible colère . "Quand on arrive à distinguer l'émotion de l'acte, résume Véronique Guérin, on offre à son enfant l'exemple d'un comportement responsable qu'il sera d'autant plus enclin à respecter." 

Ce qui demande de l'entraînement et de la persévérance mais est accessible à tous. "Je me suis rendu compte, explique Jean, père de trois enfants, qu'exercer une autorité qui ne violente pas l'enfant, c'est comme pratiquer un sport. On se muscle, on s'assouplit, on acquiert des gestes et des réflexes. Et malgré les régressions régulières, on finit par se bonifier .... ".

Au chapitre des outils à exploiter : la connaissance de soi (comprendre ce qui déclenche cette colère en moi), la maîtrise de la respiration qui permet d'intégrer l'émotion et de se recentrer sur soi avant d'agir et le sentiment de respect que l'on nourrit envers notre enfant. Y compris quand celui-ci dépasse les bornes. Y compris quand il nous déçoit.

Laurence Seugé - Vies de famille (février 2003)