Pas simple en effet de quitter la toute puissance éprouvée à la naissance pour trouver notre place au sein du monde et accepter que l'univers ne tourne pas autour de son nombril ! ... 

"Instinctivement, le bébé qui vient au monde ne vit qu'à travers ses pulsions qui s'imposent comme des lois absolues. La faim, la soif, le sommeil : autant de besoins qui devraient dicter le rythme du monde situé autour de lui, explique Daniel Coum, psychologue clinicien. Peu à peu, les parents, en posant des limites, aident Ie tout-petit à différer la satisfaction de ses besoins en fonction du rythme familial et social. Chaque étape marque l'occasion d'apprendre à se décentrer par rapport à un moi tout-puissant." 

Expériences rarement agréables, qui s'accompagnent le plus souvent d'un sentiment de frustration nécessaire à la construction de l'identité. Cela peut faire mal. Et pas seulement aux enfants. Aux parents aussi qui hésitent de plus en plus souvent à dire "non"et reculent à la seule idée de frustrer leur tendre progéniture. 

Auraient-ils des difficultés à intégrer les messages des psychanalystes ou faut-il incriminer les psys qui n'ont pas su se faire entendre ? Pour Daniel Coum, ce serait plutôt la "fatigue de l'être", l'épuisement et l'état de stress avancé qui seraient à l'origine de cette hésitation qu'éprouvent les parents à s'opposer à la toute-puissance du désir de leur enfant. 

"Ils n'ont pas démissionné, souligne-t-il. Seulement, ils ont perdu la plupart de leurs certitudes et de leurs repères, ils sont malmenés au travail et de retour chez eux, ont besoin de douceur. En cherchant auprès de leur enfant l'épanouissement qu'ils ne trouvent plus ailleurs, ils hésitent à s'opposer ou à sanctionner". 

Un écueil à surmonter peut-être en s'appuyant sur les solidarités familiales et amicales ou en sollicitant des compétences professionnelles.

Laurence Seugé - Vies de famille (février 2003)